Producer : Le Fresnoy
Coproducer : Les films d’ici
Genre : documentary
Themes : consumerism, work, society
Synopsis : In 1993, I filmed "ALWAYS MORE". The indispensable complement was missing, "LESS AND LESS", my fortieth film. It evokes in 14 minutes the development and expansion, from 1968 to 2010, of the devices based on computers, automats, interactive terminals and others that can be found in all areas. The aim of our current system appears to be to employ a single individual in each sector of activity. We are not there yet, but we're getting there... A schizophrenic world, since, at the same time, businesses have to pay the price of these suppression in an indirect way. We can't leave millions of human beings jobless. An observation that is both bitter and funny: the methods of this perpetual reduction are surprising and comical...
After filming MORE AND MORE in 1993, I had to shoot LESS AND LESS, my 4Oth film, in 2010. It evokes, in I4 minutes, the development and expansion, from 1968 to 2010, of the funny devices based on computers, automats, interactive terminals and other objects that can be found everywhere, and their consequences upon unemployment.
LUC MOULLET
LE COMIQUE EN CONTREBANDE
« Moullet, c'est Courteline revu et corrigé par Brecht. »
Jean-Luc Godard
Né en 1937, cinéphile dès l'âge de huit ans, critique aux Cahiers du cinéma à dix-huit ans aux côtés de Truffaut, Rivette, Godard, Rohmer..., auteur d'une Politique des acteurs, d'essais sur Buñuel, Lang et King Vidor, cinéaste dès 1960, acteur à partir de 1966 en même temps que producteur (de ses propres films mais aussi d'Eustache ou de Duras)... Luc Moullet, en 2009, déploie encore tous ces talents.
À ce jour, il a signé trente-huit films de tous formats, du court au long métrage, et de tous genres : comédie (Brigitte et Brigitte), aventure (Les Contrebandières), western (Une aventure de Billy le Kid, avec Jean-Pierre Léaud), film érotique (Anatomie d'un rapport, coréalisé avec sa femme, avec lui dans le rôle principal), journal intime (Ma première brasse, Les Minutes d'un faiseur de films), road movie (Parpaillon), film criminel (Au champ d'honneur), documentaire militant (Genèse d'un repas), géographique (Foix, La Cabale des oursins), comique (Barres), adaptation littéraire (Le Fantôme de Longstaff) ... Tous sont reliés par un fil d'or et d'Ariane, tendu de bout en bout : le comique.
Luc Moullet est le seul cinéaste burlesque de la Nouvelle Vague. Pince-sans-rire comme Keaton, fin observateur de la comédie sociale de son temps comme Tati et Buñuel, pataphysicien et logicien de l'absurde comme Jarry, il lui suffit de poser son regard sur l'humanité et la société qui l'entourent pour en révéler les travers. Sa démarche parascientifique et sa rationalité emballée tiennent le monde à bonne distance.
Godard, qui disait vrai, n'a cependant pas tout dit...
Le cinéma compte beaucoup d'historiens mais peu de géographes. Luc Moullet en est un. Né d’une famille originaire des Alpes du Sud, suivant sagement le conseil de Lubitsch (« pour savoir filmer des acteurs, il faut d'abord savoir filmer des montagnes »), il n'a cessé de filmer les reliefs. De là lui vient peut-être aussi son goût du dénuement. Entre littéralité et loufoquerie, son style simple et efficace, affûté à la pointe de son érudition cinéphile, est une ascèse pratiquée en pleine conscience.
LUC MOULLET
par Philippe Katerine
- Il dit qu’il a les ongles carrés et qu’il est grand.
- Il dit que les spectateurs ont peur des lions.
- Il dit qu’il a de la chance de ne pas avoir étranglé sa femme, de ne pas avoir violé sa fille.
Il a de la chance de ne pas être fou, de ne pas s’être jeté du haut du Sentier des Bans.
- Il dit qu’il est un homme des bois, un homme des cavernes.
- Il dit que ses endroits préférés au monde sont : Mariaud, New York et Majastres.
Mariaud et Majastres, ce sont deux très petits hameaux perdus dans les roubines ;
les roubines, c’est là d’où il vient et où il revient, c’est une région au sud-est de la France
très aride et très sensuelle en même temps, c’est rocailleux, noir ou blanc, peu d’arbres.
Mariaud et Majastres, on y accède très difficilement, c’est là qu’il a tourné Billy le Kid
avec Jean-Pierre Léaud, Les Naufragés de la D17, Les Contrebandières et autres.
Les roubines, «les autos passent à côté mais n’osent pas s’y risquer» dit-il.
- Il dit que les autos, c’est la barbarie et que le vélo, c’est la culture.
- Il dit qu’il veut vous vendre un pré qui ne sert à rien, de 55 pas de long et 38 pas de large.
- Il dit que c’est mieux d’entrer dans la maison par le fenestron (c’est une petite fenêtre).
- Il dit que sa grand-mère faisait manger sa merde à son frère.
- Il dit que Digne est la capitale de la France.
- Il dit que le cinéma, c’est la lutte contre la végétation, c’est la nudité,
supprimer plutôt qu’accumuler.
- Il dit qu’on l’appelle «Moullet bout d’ ficelle» parce qu’il fait des films avec 3 fois rien.
- Il dit qu’il a installé sa maison de production à Saint-Cyrice, à 883 mètres d’altitude
dans les roubines, c’est la production la plus élevée de France.
- Il dit qu’il pratique «la politique des hauteurs». Il a écrit un grand livre, Politique
des acteurs, il est lui-même un grand acteur très enfant et très vieillard en même temps.
- Il dit qu’il sait mieux que personne tourner des scènes en éboulis. On fait un pas
et plein de pierres tombent, c’est difficile de s’entendre.
- Il dit qu’il aime qu’un cinéaste aborde tous les genres. Un western (Billy le Kid),
un documentaire (Genèse d’un repas), une comédie sentimentale et cinéphile (Les Sièges
de l’Alcazar), un film d’aventure (Les Contrebandières), des courts-autofictions
(Ma première brasse), un film-couple (Anatomie d’un rapport),
un film-testament (Le Prestige de la mort), etc.
- Il dit qu’on est tous des cafards.
- Il dit qu’il vaut mieux prendre l’échelle.
- Et moi je dis que l’homme qui dit tout ça est un grand homme. Il s’appelle Luc Moullet.
Philippe Katerine est auteur-compositeur, chanteur, acteur, cinéaste et écrivain. |